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Le baldaquin

Cité épiscopale d’Albi

La tradition locale désigne par le nom de « baldaquin » le porche grandiose qui signale l’entrée méridionale de la cathédrale, la seule ouverte aux fidèles jusqu’au XIXe siècle.

Initialement à ciel ouvert, il donne accès à un portail luxueusement orné et à un vestibule couvert d’une voûte somptueuse, réalisée entre 1510 et 1515 à l’initiative de Charles de Robertet, dont il porte les armes.

Le baldaquin et le portail présentent des assises appareillées en continuité, tant dans les piédroits 1 que dans les voussures. 2

La chronologie de leur construction se déduit des blasons qui les timbrent. On élève les piliers sous l’épiscopat d’Adrien Gouffier (1519-1523) ; on élabore les arches et leurs réseaux au temps de son frère Aymard (1523-1528) ; on termine l’ensemble à l’époque d’Antoine Duprat (1528-1535).

Larges de 6 mètres, les grandes arcades culminent à 12,80 mètres ; un couronnement de 12,50 mètres les surmonte.Ces dimensions traduisent une recherche d’harmonie et d’équilibre, très sensible à l’oeil. L’appareil en pierre, particulièrement soigné, correspond à une construction de luxe fort onéreuse. Il montre des assises régulières de même épaisseur, sauf à la base des piliers et en des points particulièrement névralgiques où l’on remarque des moellons plus hauts.

Le sommet des piliers s’incline vers la cathédrale et les faces latérales s’écartent légèrement vers l’extérieur à l’appui des murs. Ce dispositif trapézoïdal garantit la stabilité de l’édifice. La dentelle de la partie supérieure se trouve renforcée par des tirants de fer qui passent dans les traverses rectilignes recoupant à trois niveaux la complexité du réseau flamboyant.

L’évolution du style,qui permet les horizontales, offre ainsi des commodités à la technique. Le baldaquin présente des torsades, des chapiteaux plats et des écus concaves qui renvoient à l’art portugais du temps de Manuel le Fortuné. Ils suggèrent des influences ibériques.

La floraison pétrifiée porte sens. Elle annonce, de manière sensible, le sacré. Le baldaquin et le portail de la cathédrale Sainte-Cécile participent d’une réponse active à la Réforme protestante, à l’époque où elle se développe. Les prélats qui occupent le siège épiscopal d’Albi, issus du cercle monarchique, opposent, longtemps avant le concile de Trente, la richesse du sensible à l’iconoclasme 3 et à la rigueur monumentale.

Au-delà de ce contexte, le baldaquin marque le passage du monde profane à l’univers du sacré ; porte vers la Jérusalem céleste, 4 il introduit à la cathédrale, manifestation physique d’une communauté à la fois institutionnelle et mystique, celle de l’Église. Il indique la voie de l’invisible, du mystère, de la vérité et du Salut.

Cette fonction initiatique se trouve renforcée par le fait que, bâti en pierre blanche et revêtu d’une ornementation exubérante, il tranche fortement sur des murs de brique puissants et nus.

1 Un pied-droit (ou piédroit) peut désigner plusieurs choses : la partie latérale d’une baie, d’une porte, d’une fenêtre, d’un manteau de cheminée (appelé également jambage), le mur vertical supportant la naissance d’une voûte, le pilier carré qui porte la naissance d’une arcade et chacune des pierres de ce pilier.

2 Désigne la courbure du profil d’une voûte ou d’un arc. Exagération de la convexité d’un profil. Partie courbe qui surmonte une porte, une fenêtre. Chacun des arcs concentriques formant l’archivolte d’une arcade, d’un portail. Ornementation composant également la décoration d’un portail des églises. Élément courbe qui surmonte l’arc d’encadrement d’une fenêtre ou d’une porte. Voussure partie inférieure d’un linteau de baie par opposition à appuis de baie et tableaux de baie (parties verticales).

3 L’iconoclasme (du grec εικών eikon « icône » et klaô « casser ») est, au sens strict, la destruction délibérée de symboles ou représentations religieuses (appartenant à sa propre culture), généralement pour des motifs religieux ou politiques. Ce courant de pensée rejette l’adoration vouée aux représentations du divin, dans les icônes en particulier. L’iconoclasme est opposé à l’iconodulie. Dans un second sens, le terme iconoclaste (adjectif ou nom) désigne une attitude ou un comportement d’hostilité manifeste aux traditions.

4 Jérusalem céleste - aussi appelée nouvelle Jérusalem, tabernacle de Dieu, ville sainte - est un concept traditionnel juif et chrétien, associé à la fois au jardin d’Eden, à la terre promise et à la reconstruction du Temple après la fin de la captivité des juifs à Babylone ; selon les traditions elle peut être une ville littérale, un lieu spirituel, ou représenter l’aboutissement de l’Histoire et le retour à la perfection initiale.


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